L'Apôtre, qu'un livre récent a appelé « l'enfant terrible du christianisme1 », est une personnalité paradoxale. Ses écrits ont de la vigueur, parfois même de la fougue, mais on peut également y percevoir des éléments de fragilité qui étonnent chez un homme dont la personne et la pensée furent déterminantes pour que le mouvement issu de Jésus de Nazareth devienne une nouvelle religion.

Un Apôtre revêtu de force

Lorsqu'il présente aux Romains le bilan de son activité, Paul écrit : « J'ai lieu d'être fier en Jésus Christ, au sujet de l'œuvre de Dieu. Car je n'oserais rien mentionner, sinon ce que Christ a fait par moi pour conduire les païens à l'obéissance, par la parole et par l'action, par la force des signes et des prodiges, par la force de l'Esprit. Ainsi, depuis Jérusalem, en rayonnant jusqu'à l'Illyrie, j'ai pleinement assuré l'annonce de l'Évangile du Christ » (Rm 15, 17-19)2.

La vigueur et l'étendue de son activité apostolique le conduisent, dans la même épître, à se classer parmi les forts, comme il l'écrit un peu plus haut dans son texte : « C'est un devoir pour nous, les forts, de porter l'infirmité des faibles et de ne pas rechercher ce qui nous plaît » (Rm 15, 1).

Cette force se manifeste également – bien que le terme ne soit pas employé – dans les trois chapitres de la première épître aux Corinthiens qu'il consacre aux nourritures offertes aux dieux de la cité, dans les temples païens de la ville (1 Co 8, 1 – 11, 1). Peut-on ou non consommer ces aliments ? Dans un premier temps, il répond « oui », puisque les idoles ne sont rien d'autre que du néant. Ce qui leur est offert n'est alors que de la nourriture ordinaire. En fournissant cette réponse,